Ah, la nostalgie ! Ce sentiment étrange et fascinant qui nous transporte dans les doux souvenirs du passé. Et s’il y a une icône qui incarne parfaitement cette nostalgie et l’amour des vinyles, c’est bien le jukebox. Ces machines emblématiques, avec leur design rétro et leur capacité à jouer les hits de différentes époques, rappellent à certains de nous une période révolue, mais pas oubliée. Dans cet article, nous allons plonger dans le temps des jukebox, ces fabuleuses machines à musique qui ont marqué plusieurs générations et culminaient dans tous les bars et tous les lieux en vogue au temps des vinyles.

Qu’est-ce qu’un Jukebox ?

Un jukebox est plus qu’un simple lecteur de musique. Il s’agit d’un phonographe automatisé doté d’un mécanisme de sélection de disques ou de fichiers musicaux désormais, comme des MP3 dans les versions modernes.

La singularité du jukebox repose sur trois caractéristiques essentielles : une fonction de sélection automatisée de la musique stockée dans l’appareil ou sur un ordinateur connecté, un système d’amplification du son grâce à un amplificateur intégré, et enfin, une ou plusieurs enceintes alimentées électriquement. Ce trio de fonctionnalités donne au jukebox son statut d’icône culturelle et musicale incontournable.

Le Jukebox : une évolution du gramophone pour l’espace public

Le jukebox a signé la transition du gramophone vers une utilisation plus publique et interactive. Destiné aux lieux sociaux comme les bars et les clubs, il s’est distingué par un système de sélection sophistiqué, généralement basé sur des touches alphabétiques ou numériques. C’est aussi le symbole d’une période où le bar devient le lieu de rencontre pour les « bandes », autrement dit les adolescents des générations nées dans les années 60 et qui se retrouvent dans ses endroits de socialisation.

Le principe est simple : une fois que l’utilisateur insère la pièce de monnaie nécessaire, un mécanisme interne choisit le disque correspondant, permettant ainsi une écoute collective du titre choisi. Conçu comme un meuble, sa taille imposante permet de stocker un grand nombre de disques, offrant ainsi une variété musicale suffisante pour satisfaire différents goûts. On passe dans les années suivants le plan Marshall à une économie capitalistique qui commence à nous vendre à la pièce du temps de loisir : le flipper vend du temps de jeu, le Juke box du temps d’écoute, … La relation à l’argent change subrepticement.

L’évolution du design des jukebox a également joué un rôle crucial dans son succès commercial et dans son statut d’objet de collection. Aujourd’hui, cet appareil conserve une aura culte, étant à la fois un symbole nostalgique pour les audiophiles et un objet de collection convoité. S’il tourne avec de 45 tours vinyle, encore mieux. L’effet dans un salon est tout simplement magique.

L’âge d’or du Jukebox : de 1945 à 1975

L’année 1946 est souvent considérée comme un point de basculement dans l’épopée du jukebox. C’est à cette date que la firme américaine Wurlitzer lance le modèle 1015. Ce jukebox, avec sa forme arrondie et ses fameux « bubbles tubes », a été produit à plus de 60 000 exemplaires, soutenu par une campagne marketing d’envergure. Bien que ses performances se limitent à la lecture de 24 disques sur une seule face, ce modèle ouvre la voie à un nouveau marché.

Les années 1950 voient d’autres géants comme Rock-Ola, AMI et Seeburg entrer dans la compétition. Seeburg introduit notamment le disque vinyle 45 tours en 1950, en remplacement du 78 tours, avec des modèles standard capables de contenir jusqu’à 40 disques.

De 1945 à 1975, l’industrie du jukebox vit une période florissante, s’associant indéfectiblement avec l’ascension du rock’n’roll. Plus de deux millions de machines sont produites pendant ces « trente glorieuses ».

Parmi les modèles notables, on peut citer les jukebox muraux comme le Seeburg 3 W-1 ou le Wurlitzer 5250, aussi appelés « wallboxes » en anglais. Certains établissements, notamment les diners américains, optaient pour le système « hideaway », une mécanique cachée sous le bar et reliée à des wallboxes intégrées dans les tables, permettant aux clients de sélectionner leurs chansons sans interrompre leur repas ou leur conversation.

Du déclin à la renaissance : le Jukebox dans l’ère numérique

À partir des années 1970, le jukebox subit un déclin marqué, dû aux changements technologiques et sociaux. Wurlitzer USA, l’une des marques emblématiques, met fin à ses opérations en 1974 après l’échec de son dernier modèle, le 1050. Cependant, la transition vers le numérique dans les années 1990 offre un nouvel élan aux jukeboxes, avec l’introduction de modèles lisant les Compact Discs et plus tard, offrant un accès à une bibliothèque musicale en ligne.

Néanmoins, dans un monde où l’écoute musicale est de plus en plus individualisée grâce aux appareils portables, le jukebox n’a pas retrouvé son ancienne gloire. Seuls trois fabricants notables subsistent : Rock-Ola aux États-Unis, Sound Leisure Ltd au Royaume-Uni et Deutsche-Wurlitzer en Allemagne. Leur activité principale se concentre sur la production de répliques du fameux Wurlitzer 1015, en versions CD ou 45 tours.

En France, les bars sont aussi de plus en plus désertés et on a du mal à voir comment l’appareil culte des années 60-70 et ses vinyles pourraient y refaire son trou. Bien que le jukebox ne soit plus l’icône culturelle qu’il était autrefois, il demeure un objet de collection convoité, surtout les modèles vintage comme le 1015 de Wurlitzer et les unités d’avant-guerre.